vendredi 13 février 2009

Catch me if you can


Ils courent, ils volent même ces garçons. S’agit-t-il d’une publicité pour la dernière paire de Nike? Si la bulle d’air permettait ce genre de pas de géants, tous les petits poucets en quête de sensations auraient leurs entrées au Foot Locker, c’est sûr. Et particulièrement ceux qui sont venus manifester leur soutien à la population gazaoui en ce dimanche de janvier. Car la longue marche à travers Paris touche à sa fin, et maintenant, il faut courir. Le plus vite possible. Alex Anger, photographe indépendant, les a suivi dans cette course folle. 

Il est 17h30, les CRS viennent de charger. Arrosés par une averse de projectiles depuis une demi-heure place de la Madeleine, les casqués répliquent. Ça sent la matraque, et une course-poursuite s’engage dans les petites rues du VIIIe arrondissement.  Chacun a son uniforme, bleu d’un côté, banlieue nord-est de l’autre. Le classique jogging tranche d’ailleurs un peu avec les façades du quartier huppé. Mais, loin du jugement esthétique, son utilité n’est plus à démontrer dans ce genre de situation. Légèreté du textile, souplesse et dextérité optimale. Au premier plan, la vitesse du saut gonfle la toile grise que l’on imagine déjà humide de transpiration. Le cauchemar de l’aérodynamique. 

On comprend à présent l’utilité du fameux « trou de boulette » qui, à l’instar du vide dans la banderole, casse la prise au vent du survêt’. Et l’analyse du ballonnement de ce pantalon autorise deux hypothèses : soit son propriétaire ne fume pas, soit il est très adroit.  Les volutes d’air dessinent sur le tissu un joli jeu d’ombres et lumières. Presque du De la Tour, version guérilla urbaine en vol plané, altitude : un mètre vingt. L’atterrissage est prévu dans moins de deux secondes. Pas forcément un landing kiss d’ailleurs. 
Pourtant, dans l’instantané du cliché, le temps est resté suspendu à cette paire de jambes pour le moins aérienne. Le point d’appui est incertain, mais pourquoi pas ce toit de voiture plutôt tentant. Et, après l’extase suscitée par la beauté du geste, cette question logique qui découle. Pourquoi certains ont-il préférés les capots et pare-brise à l’asphalte pour ce quatre cents mètre un peu forcé ? Pas certain que ça soit plus rapide. Mais au moins Attila passe et occupe tout l’espace. 

L’herbe ne repoussera pas, de toutes façon c’est du bitume, mais sur le chemin, 7 commerces sont pillés et une quinzaine de véhicules dégradés. En tout cas selon la version de la préfecture de police à la statistique parfois un peu phocéenne.  

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